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« Sunitinib et Tumeurs Stromales Gastro Intestinales » - P. Artru & J-Y. Blay

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Le sunitib a été développé initialement en phase I par une équipe française, qui a rapporté dès cette première étude des réponses objectives dans plusieurs tumeurs, dont des adénocarcinomes du rein, des tumeurs neuroendocrines et des GIST en progression sous imatinib.

Découvert par le grand public oncologique à l’ASCO 2005, le sunitib (Sutent™) est désormais établi comme une thérapeutique ciblée de deuxième ligne dans le traitement des tumeurs stromales gastrointestinales.

1. Modes d’action

· Le sunitinib est un inhibiteur oral de tyrosine-kinase occupant le site de fixation de l’ATP sur la kinase.

Il agit sur plusieurs récepteurs tyrosine kinase transmembranaires comprenant les récepteurs du VEGF (VEGFR1, VEGFR2 et VEGFR3), les récepteurs du PDGF (PDGFRα et PDGFR β), les récepteurs KIT, et RET. L’inhibition par le sunitinib de l’activité tyrosine kinase de ces récepteurs va ainsi bloquer la transduction du signal normalement provoqué par leur activation. Ceci permet en théorie un double blocage, de la prolifération et de la survie des cellules tumorales, mais aussi une inhibition de la principale cytokine responsable de l’établissement de la néo-angiogénèse tumorale. La contribution respective de ces deux activités sur l’effet antitumoral du sunitinib reste débattue.

· L’activité du sunitinib sur les tumeurs stromales est corrélée au site de mutation des récepteurs activés: ainsi, dans une série de 74 patients issus d’un essai de phase I/II et tous résistants à l’imatinib, le bénéfice clinique (défini comme une réponse tumorale ou une stabilité supérieure à 6 mois) apporté par le sunitinib était maximal (42%) en cas de mutation de l’exon 9 de KIT contre 36% en cas de mutation de l’exon 11 de KIT, 25% en cas de mutation de PFGFRA et 9% en cas de mutation de KIT WT. Cette différence se retrouvant également en termes de survie sans progression et de survie globale.

· Cependant, cette spécificité n’est pas retrouvée lorsque les tests sont effectués in vitro. Il est ainsi possible que l’apparente moindre efficacité du sunitinib sur les mutations de l’exon 11, résulte en fait de la sélection de mutations secondaires chez les patients longtemps exposés à l’imatinib (et donc préférentiellement exon 11) : les mutations secondaires portant sur l’exon 17 et 18 seraient dans ce cadre particulièrement résistantes à sunitinib, tandis que les mutations secondaires portant sur les exons 13 ou 14 resteraient susceptibles à cette molécule.

2. Modes d’administration, métabolisme, et interactions médicamenteuses.

· Du fait de son caractère liposoluble, le sunitinib, comme d’autres inhibiteurs de tyrosine-kinase (gefitinib : Iressa™, imatinib : Glivec™…etc) est administré par voie orale en une prise unique à la posologie usuelle de 50 mg, quatre semaines sur six. Une nouvelle modalité d’administration, en continu, à 37.5mg par jour est également évaluée avec une tolérance possiblement meilleure. Les pics plasmatiques sont atteints en 6 à 12 heures.

· Le métabolisme est hépatique au niveau du cytochrome P450 (enzyme CYP3A4), l’élimination étant principalement digestive. Il n’y a donc pas d’ajustement de posologie en cas de baisse de la clairance de la créatinine mais des adaptations de dose sont recommandées en cas de prise médicamenteuse concomitante modifiant l’activité du cytochrome P450 : Les inducteurs comme la rifampicine ou la carbamazépine conduisent à augmenter la dose de sunitinib alors que les inhibiteurs comme le kétoconazole à la diminuer. Les patients sous sunitinib doivent être particulièrement surveillés en cas d’administration concomittente d’antivitamine K, et dans ce cas, un passage aux HBPM est à recommander si possible.

3. Sunitinib et tumeurs stromales digestives : principaux essais cliniques

· L’efficacité du sunitinib a été démontrée par une large étude de phase III multicentrique internationale présentée en 2005 à l’ASCO. Dans cet essai n’étaient inclus que des patients avec tumeur stromale métastatique ou non résécable présentant soit une résistance soit une intolérance à l’imatinib. Ils étaient randomisés selon un ratio 2/1 entre sunitinib 50 mg/j 4 semaines sur 6 ou placebo, avec dans ce bras en cas de progression tumorale selon les critères RECIST, traitement de rattrapage par sunitinib selon les mêmes modalités. L’objectif principal était le temps jusqu’à progression. Au total, 312 patients ont été inclus (207 sous sunitinib et 105 sous placebo). La dose médiane quotidienne d’imatinib antérieurement reçue était de 800 mg. Le sunitinib a dans ce travail démontré un gain majeur en survie sans progression face au placebo avec des médianes respectivement de 6.3 mois versus 1.5 mois (p

La tolérance au sunitinib a été acceptable sans aucune toxicité de grade 4 constatée. Sur le plan hématologique, 8% de neutropénie de grade 3 étaient notées. Pour les toxicités non-hématologiques on relevait une asthénie de grade 3 chez 7% des patients et une hypertension artérielle de même grade chez 4% des patients.

· Les résultats de cette large étude de phase III confirmaient ceux de l’étude de phase I-II présentée au même congrès de l’ASCO, dans laquelle, sur une population similaire de 97 patients réfractaires à l’imatinib, le taux de réponse était de 8% avec une médiane de survie sans progression de 7.8 mois et une médiane de survie globale de 19.8 mois.

4. Sunitinib et autres cancers.

· L’autre grande indication du sunitinib lui a valu les honneurs de la séance plénière de l’ASCO 2006 avec un essai de phase III portant sur 750 patients porteurs d’un cancer du rein métastatique randomisés entre sunitinib aux doses usuelles ou interféron. Les taux de réponse et la médiane de survie sans progression étaient statistiquement supérieurs pour le sunitinib alors même que les données de survie n’étaient pas matures.

De manière notable, le sunitinib permet d’obtenir un contrôle tumoral méritant de plus amples investigations dans les tumeurs neuroendocrine, les adénocarcinomes du sein en phase avancée, les cancers bronchiques non à petites cellules.

bibliographiesunitinibgist.doc